SMED … mais au fait, qu’est-ce que ça veut dire ?
SMED est un acronyme anglophone.
SMED = Single Minute Exchange of Die
Comme vous êtes des pros de “l’Anglishe”, vous savez que “Single” signifie “Célibataire” et que “Die” signifie “Mort”.
Un SMED est donc “un échange de la mort d’un célibataire chaque minute”. Vous connaissiez le speed dating où vous rencontrez un célibataire et vous avez 7 minutes avant d’en changer.
Là dans le cadre du SMED, c’est toutes les minutes !!! C’est pour ça qu’on dit que c’est un “échange de la mort” …
Comme dirait Gaston : “Meeuuuh non ! C’est pas ça …. !!!” …. Et il aurait raison !
Si nous mettons mon humour à 2 balles de côté …
SMED : Signification, Histoire, méthode
SMED = Single Minute Exchange of Die
Sauf que dans ce cas “Die” signifie “Matrice” (d’une presse) et “Single Minute” signifie “un nombre de minutes à un seul chiffre” (soit 1 à 9). En bon français …
SMED = Changement d’une Matrice en moins de 10 Minutes
L’objectif du SMED est donc de réduire le temps de changement de série pour qu’il s’effectue en moins de 10 minutes.
Un (tout) petit peu d’histoire
La méthode SMED a été créée par un ingénieur japonais du nom de Shigeo SHINGO.
M. SHINGO est intervenu durant une grande partie de sa carrière auprès d’industriels japonais dont les firmes MAZDA, MITSUBICHI et TOYOTA. La mise au point de sa méthode s’est faite sur 19 ans, de 1950 à 1969.
Cette méthode fait partie des fondations du TPS (Toyota Production System).
La méthode
Nota : Je tiens à préciser que ce paragraphe ne remplacera pas une formation complète avec application sur le terrain.
La méthode est assez simple, mais pour bien la comprendre il faut connaître trois définitions, qui sont :
- Le changement de série : Un changement de série est le temps qui s’écoule entre la fin de la dernière pièce bonne de la série précédente et le début de la première pièce bonne de la série suivante
Nota : La première pièce bonne est la dernière pièce d’essai. À moins de pointer chaque début de pièce d’essai, il n’est pas toujours facile de connaître son début avec précision. Prendre comme fin de changement de série la fin de la première pièce bonne est souvent toléré, car plus pratique et sans grandes conséquences.
- Opération interne / temps interne :
C’est une opération qui ne peut se dérouler que lorsque la machine est à l’arrêt
- Opération externe / temps externe :
C’est une opération qui peut se dérouler lorsque la machine est en fonctionnement
La méthode SMED se déroule principalement en 4 étapes majeures :
- Filmer et séquencer : Vous filmez un changement de série en prenant soin de faire un focus sur les mains du régleur. Je conseille au “caméraman” de se tenir à environ 60 à 80 cm des mains de l’opérateur. Cela permet de voir non seulement les mains du régleur, mais aussi la posture de son corps. Par la suite, le film est projeté en présence de l’opérateur. Ce dernier précisera alors les opérations qu’il effectue et le chronomètre donnera factuellement la durée de celles-ci.
- Dissocier : Une fois la liste établie (opérations et temps), il faut s’accorder pour classer ces dernières dans l’une des catégories Interne (machine obligatoirement arrêtée) ou Externe (machine pouvant fonctionner)
- Convertir : C’est là, la grande astuce du SMED. Trouver des solutions pour convertir le maximum d’opérations internes en opérations externes. Ce n’est pas toujours simple et cela demande souvent quelques investissements (en général assez légers).
- Réduire : Le but de cette étape est de réduire au maximum le temps des opérations. La priorité est mise sur les opérations internes, car cela à un impact immédiat sur la réduction du temps d’arrêt de la machine.
Mais il est aussi important de chercher à réduire le temps des opérations externes, car cela libère plus rapidement l’opérateur. Ce dernier peut alors prendre en charge une autre tâche.
Cette étape est le royaume de la créativité et de l’inventivité. Le Brainstorming (faites chauffer les neurones) est à l’honneur. Tous les moyens sont bons pour gagner du temps.
Personnellement, je conseille au groupe de raisonner, dans un premier temps, à moyens et budgets illimités. Cela à le mérite de permettre de “se lâcher” et de faire “émerger” de nouvelles idées; idées qui seront pillées et enrichies par les autres pour souvent aboutir à des astuces purement géniales (et bien souvent peu chères).
Il faut savoir en revanche que les investissements nécessaires peuvent vite devenir conséquents si l’on souhaite pousser les réductions à leurs extrêmes (avec des résultats stupéfiants).
Un récap, un récap, un récap …
Comme souvent une image valant 1 000 mots …
Orthodoxie vs réalité
L’orthodoxie de la méthode nous dit que l’objectif à atteindre est un changement de série en moins de 10 minutes.
Dans la réalité toutefois, il faut se garder d’être trop rigide. Le pragmatisme est de mise. Surtout en PME.
En effet, lorsque je mène des chantiers SMED, j’essaie de pousser les gains le plus loin possible … tout en faisant preuve de discernement.
Il faut raison garder. Lorsque vous divisez un temps de changement de série par 3 ou par 5, et parvenez à atteindre environ 30 minutes sans avoir engagé de gros moyens, même si l’objectif “moins de 10 minutes” n’est pas atteint, l’entreprise est déjà super contente …
Or bien souvent, pour réduire encore ces temps, il faut commencer à envisager des dépenses financières conséquentes.
La question “Cela vaut-il le coup ?” se pose alors et la réponse est bien souvent négative. Du moins dans un premier temps …
Car c’est aussi une première étape qu’il faut “digérer” et utiliser. Et cela s’apprend. Et cela demande un peu de temps.
Lorsque la maturité Lean progressera, la nécessité de faire un second chantier SMED pour, cette fois, “aller chercher” les 10 minutes se fera naturellement sentir.
Le standard
Nous avons jusqu’ici évoqué la méthode. Vous trouverez sur le Web bien des documents relatifs au SMED dont certains sont très bien faits et bien plus “sexy” que cet humble article.
Pourtant, je n’en ai trouvé aucun (je ne les ai pas tous lus non plus …) qui évoque “l’après chantier”. Or, ce point est très important !
En effet, faire un chantier en appliquant la méthodologie décrite ci-dessus est bien. Mais si l’on s’arrête là, c’est du “one shot” et, à part se faire plaisir, cela ne sert pas à grand-chose.
Le chantier doit absolument aboutir à un (nouveau) standard de changement de série …
… et celui-ci doit être respecté et appliqué !!!
Cela signifie que suite à un chantier SMED, tout nouveau changement de série doit se faire en respectant le standard défini lors du chantier et le temps doit être chronométré.
Ainsi, il sera possible de voir s’il y a une dérive, mais surtout, il sera possible de mesurer l’impact des kaizen apportés par les régleurs au fur et à mesure de leurs nouvelles idées d’améliorations.
Se contraindre à chronométrer tous les changements de série, c’est se mettre en position favorable pour respecter et améliorer le standard établi
C’est l’esprit Kaizen !
Nota : De vous à moi, “respecter et améliorer”, ça ne vous rappelle rien … pas même un peu le 5ème S des 5S (suivre et progresser) ? 😉 Vous voyez, dans le Lean tout est lié, tout se tient, tout est cohérent …
OMED, OTED
Avec le temps, il est apparu des déclinaisons du SMED.
Il y a l’OMED = One Minute Exchange of Die (changement de série en moins d’une minute)
Il y a aussi l’OTED = One Touch Exchange of Die (changement de série immédiat)
Pour intéressantes qu’elles soient, ces méthodes ne sont ni plus ni moins que du SMED poussé à son extrême.
Prochain article
Je terminerai cette série d’articles consacrée à la méthode SMED par un exemple récent de chantier SMED … et si possible, j’essaierai de vous montrer quelques petites vidéos prises lors de ce chantier.
Alors prêt pour attaquer un chantier SMED dans votre boîte ?
Retour PingLean - Un exemple de chantier SMED | Au fil du Lean ...
Retour PingLean - Les principes du SMED 2/2 | Au fil du Lean ...
Bonjour,
D’abord je tiens à vous féliciter pour cet article,j’ai compris pleins de choses grâce à vous. Néanmoins, je bloque sur la première étape: comment choisir le chantier SMED?
Par example dans un atelier de 16 machines et où toutes les machines posent problème, quelle machine choisir? la plus rapide ou la plus lente? la plus vielle ou la plus récente? la plus proche du local outillage ou la plus loin? et pleins d’autres questions.
Merci d’avance.
Cordialement
Bonjour Majda,
je vous remercie pour votre commentaire.
En revanche, je ne sais pas trop quoi répondre à votre question. J’ai envie de dire : « Prenez le chantier qui vous tente le plus »
Pour ma part, j’aime bien les vieilles machines, car il y a plus de mécanique et moins d’électronique. De plus, comme elles sont vieilles, on a moins de scrupule
s’il faut un peu les transformer (souder une patte support d’outil, percer un trou dans un carter pour mettre un crochet, etc.).
Mais ce n’est pas une règle …
Par contre, sans chercher à atteindre vraiment un temps inférieur à 10 minutes, il faut se fixer comme objectif que le temps de réglage
après le chantier soit au moins inférieur de 50 % par rapport au réglage avant chantier. En gros, il faut au moins diviser le temps par deux.
Sinon, ce n’est pas un chantier fait dans l’esprit SMED.
Et souvenez-vous, le grand secret du SMED est : « Comment je fais pour transformer des temps internes en temps externes ? ». Avant même de chercher à réduire
les temps, car la réduction des temps se fait le plus souvent par l’apport de ressources qui coutent très cher.
Bon courage à vous pour la suite.
Cordialement,
Eric