Un 5P réussi : Exemple

Les caristes sont des “bourrins” !!!

 

 

Chariot + bombe

 

C’est là, la seule et unique cause qui m’a été donnée !!!

Le chef d’équipe était “furax”. Une fois de plus il constatait qu’un convoyeur à rouleaux avait ses pieds arrachés ou pliés.

J’en ai marre, me dit-il. Les caristes n’ont rien à f… du matériel. Ils se comportent comme des bourrins. On fait réparer le convoyeur et une semaine après il est déjà massacré.

En plus, me dit-il, on dérange les gars de la maintenance alors qu’ils ont des choses plus importantes à faire. Et puis à force de remplacer et renfoncer les pieds des convoyeurs, le sol est devenu un véritable gruyère et à chaque nouvel arrachage de pied, c’est la dalle en béton qui se détériore.

J’en ai vraiment marre de ces caristes, on les a engueulés x fois, mais rien ne change. Ils me font ……….

 

Et l’orage est passé …

 

Une fois l’orage passé (sur le moment, aucune discussion n’eut été possible), le convoyeur ayant été réparé pour la nième fois (grande lassitude du personnel de maintenance), je suis allé voir le chef d’équipe en lui demandant si cela l’intéresserait de résoudre vraiment le problème.

Il n’osa pas trop me ricaner au nez … mais n’en pensa pas moins.

 

Il accepta néanmoins de jouer le jeu.

 

Go, See, Ask Why …

 

C’est en quelques mots, ce que nous avons fait. Nous sommes allés sur le Gemba/terrain et nous avons observé les caristes prendre des palettes sur le convoyeur.

Inutile de dire que la présence du chef et du consultant sur le terrain n’est pas passée inaperçue.

Surtout de la part des caristes qui s’étaient fait remonter les bretelles (une nième fois). Ils faisaient très attention … 😉

Néanmoins, quelque chose a immédiatement sauté à nos yeux.

Chariot et convoyeur 1

 

 

 

À chaque passage, le cariste venait en butée contre le convoyeur !!!

 

 

 

Chariot et convoyeur 2

 

 

Inutile de dire que très rapidement, le convoyeur allait à nouveau se retrouver plié.

 

 

 

 

L’instant magique … le 5 Pourquoi

 

Je n’ai pas parlé de 5P.

J’ai juste proposé au chef d’équipe de faire venir un des caristes présents à ce moment-là .

Je leur ai simplement dit :

Voilà, nous sommes devant un problème qui revient sans arrêt. Au bout de quelques jours ou semaines, le convoyeur se retrouve plié. On a beau le réparer, cela recommence toujours. La maintenance en a marre de réparer, le chef d’équipe en a marre de perturber sa production lors de la réparation et les caristes en ont marre de se faire engueuler, vrai ?

 

Perplexes, ne sachant pas trop où je voulais en venir, ils m’ont quand même répondu par l’affirmative.

Ok alors :

  • Pourquoi le convoyeur est-il plié ?

Parce que nous tapons dans le convoyeur avec notre chariot

 

  • Pourquoi tapez-vous contre le convoyeur avec votre chariot ?

Parce que nous venons en butée contre le convoyeur

 

  • Pourquoi venez-vous en butée contre le convoyeur ?

Parce que nous ne savons pas où nous arrêter

 

  • Pourquoi ne savez-vous pas où vous arrêter ?

Parce que nous ne voyons plus le bout des fourches qui se trouvent sous les palettes. Alors, nous continuons jusqu’au bout pour être certain de bien prendre la palette

 

  • Pourquoi le fait de ne plus voir le bout des fourches est-il un problème lorsqu’on prend la palette ?

Parce que ça me sert de repère visuel pour savoir si ma palette est correctement prise. Si les fourches dépassent, c’est bon, sinon la palette risque de basculer vers l’avant lorsqu’on va la soulever et reculer

 

La cause racine était

 

… le manque de repère visuel !!!

 

Quelle contremesure ?

 

Partant de cette cause racine, nous avons discuté tous les trois, du meilleur moyen de donner un repère visuel au cariste. Nous avons d’abord pensé mettre un marquage au sol, mais le cariste nous l’a déconseillé. Il allait rapidement disparaitre avec les passages ou risquait de ne pas être visible.

Le mieux, nous a-t-il dit, ce serait d’avoir un repère visuel à la hauteur de nos yeux, lorsque nous conduisons notre chariot.

Il a alors été décidé d’installer un portique métallique rayé jaune et noir (donc très visuel), haut d’environ 1,80 mètre, et placé en avant du convoyeur.

 

Chariot et convoyeur 3

 

Ainsi, le cariste venant délicatement faire “buter” son mât contre ce portique serait certain que sa palette est bien prise, sans devoir aller prendre appui sur le convoyeur.

Deux jours après le portique était en place …

 

… et cela a fonctionné !!!

 

Le convoyeur en question n’a plus été endommagé. De plus, du fait de sa hauteur, le portique est capable d’encaisser de légères déformations lorsqu’on vient prendre appui dessus.

 

Que faut-il retenir ?

 

En situation normale de travail, le comportement n’est jamais la cause racine d’un problème.

Si une erreur s’est produite, …

 

… c’est qu’elle a pu se produire !

 

J’entends par là que mon processus est porteur d’une “faille” cachée et que celle-ci n’a pas encore été identifiée.

Et dans ce cas, un 5P bien mené est souvent un bon “révélateur”.

face-grin

 

Quel bonheur … une faille, … un défaut, … encore un moyen de s’améliorer !

 

 

 

Et vous, avez-vous des exemples de 5P réussis ?

Laissez-moi un commentaire, ce sera sympa.

 

 

 

6 Commentaires

  1. Magique procédé des 5 P ! Merci de cette démonstration teintée de bon sens. Mais pourquoi ont-ils attendu si longtemps pour y remédier ? Cela me laisse perplexe…

    • Bonjour Véronique,

      je te remercie pour ton commentaire ainsi que pour cette question elle aussi … pleine de bon sens.

      Pourquoi, dans nos vies personnelles, laissons-nous trainer sur une étagère la pièce plastique cassée du jouet d’un de nos enfants pendant des semaines voire des mois? Il suffit pourtant de quelques secondes pour la recoller …

      Pourquoi, laisse-t-on notre placard encombré de vêtement que l’on a plus porté parfois depuis plusieurs années?

      C’est en fait assez simple. Comme disait Jacques Dutronc dans une de ses chansons « j’y pense et puis j’oublie… ».

      Nous n’intervenons pas, car nous considérons ces sujets comme « secondaires ». Pour un chef d’atelier, le principal, c’est de sortir la production en temps et heure. Il cherchera donc tout ce qui est efficace pour éviter de prendre du retard. Le convoyeur est détérioré, … je le fais réparer … et ça repart.

      Ce n’est que lorsque le problème prend des proportions « énormes » (comme la dalle de béton qui lâche) ou qu’il revient de plus en plus souvent, que l’on décide de s’en préoccuper.

      Ne dit-on pas qu’il faut qu’il y ait eu un certain nombre d’accidents mortels avant d’installer un feu rouge (bien anti-Lean 😉 ) à un carrefour dangereux ?

      Il faut du temps pour faire évoluer nos schémas mentaux.

      A bientôt Véronique.

      Eric

  2. Bonjour,

    merci pour votre blog je le suis depuis que je suis sous un projet de LEAN dans mon nouveau emploi,
    je suis ingénieur méthode dans une usine de fabrication de verre flottant (float glass) en Algerie.
    Et pour les problèmes … on en a à la ramasse.
    pour les MUDA il y en a pas mal aussi.

    Bon pour le les 5P j’ai un exemple valide. mais pour les caristes je en ai un.
    dans la manutention du verre on utilises des engins spécialement pour le verre, et ces engins utilises des batteries (des énorme batteries pour être exacte) afin de changer ces batteries (pour les charger) soit on utilise un pont élévateur roulant soit un chariot, et la vient notre problème (les caristes sont des bourrins) déjà on utilise 2 types de chariot , le 3 tonnes et le 7 tonnes, lorsque le chariot fait entrer ses fourches sous la batterie pour la décharger de l’engin des fois ils heurtent l’engin quand ses fourche dépassent, et ca fait déformer le chassis. et on a peur que ca passera directe dans les moteur électrique et là ca va être la catastrophe.
    Alors OK pour un repère visuel. mais un repére visuel fixe n’est pas intéressant parce-que le changement des batterie peut être n’importe ou dans l’usine ( et croyez moi elle est grande) donc il faut un repère mobile ou fixé dans les chariot, alors j’ai pensé a tracer sur les fourches ces repère pour aider le cariste a ce repérer, j’ai fait un premier test avec le 7 tonnes ca marche bien, mais pour le 3 tonnes je pense ajouter les repères sous les fourches parce que le chariot et petit et il fait monter ses fourche très haut ce qui ne permet pas de voir les repères sur les fourches.

    en attendant si ca marche vraiment je vous dis merci et bonne continuation.

    A.FARES

    • Bonjour,

      permettez-moi de vous remercier doublement. D’abord pour suivre le blog régulièrement (cela m’encourage à continuer), mais aussi pour le commentaire que vous avez laissé.

      Si je comprends bien, le chariot de 7t prend les batteries par « en dessous ». Un repère visuel sur les fourches suffit apparemment pour ne pas aller trop loin. Avez-vous bien vérifié que cela fonctionnait sur le terrain avec les caristes eux-mêmes (du moins le conducteur du chariot de 7 tonnes) ? Surtout, n’oubliez pas de leur demander leur avis. Ils vous donneront des solutions …

      Concernant le chariot de 3 tonnes, je ne comprends pas bien. Comment l’utilisez-vous pour enlever les batteries ? Soulevez-vous les batteries avec les élingues (grosses sangles utilisées pour soulever des charges lourdes) ? Si tel est le cas, les fourches du chariot 3t sont alors au-dessus de la batterie. Elles ne rentrent pas dans le châssis et donc ne risquent pas de générer des dégâts. Il n’y a donc plus de nécessité d’avoir des repères visuels sur (ou plutôt sous) les fourches. En fait dans ce cas, il n’y a plus de problème …

      Mais je ne suis pas sûr de vous avoir bien compris.

      Sinon, une question me vient à l’esprit. Pourquoi avez-vous besoin de charger les batteries en cours de journées ? L’utilisation des chariots est-elle si intensive qu’elle nécessite une recharge durant la période de travail ? N’y a-t-il pas des « ports » et des horaires (heures des repas, nuit, …) sur lesquels connecter les chariots … pour les avoir toujours « d’attaque » lorsqu’on en a besoin ?

      Si vous souhaitez m’en dire un petit peu plus, j’essaierai de vous aider. 😉

      Bien cordialement,

      Eric

  3. Bonjour,

    Pour revenir sur le « pourquoi tant de temps pour y remédier », j’ai une théorie maintes fois vérifiée : celle de la grenouille dans le chaudron.
    Prenez une grenouille, jetez-là dans un chaudron d’eau bouillante. Elle va se débattre, certainement arriver à sauter hors de l’eau (on lui souhaite en tout cas).
    Maintenant prenez une grenouille, plongez-la dans un chaudron d’eau froide que vous mettez sur le feu, elle mourra ébouillantée sans avoir bouger…
    Il s’agit bien sûr d’une métaphore qui illustre bien l’immobilisme dont on est parfois capable de faire preuve face à des situations dont on ne distingue ni l’origine ni les solutions, et qui paraissent désormais secondaires. C’est humain.

    Une bonne solution de remédier à cela est de mettre en place les rapports d’étonnement pour les nouveaux arrivants, y compris stagiaires, intérimaires, prestataires…

    Bien à vous,

    Jérôme

    • Bonjour Jérôme,

      je vous remercie pour votre commentaire et votre exemple éloquent (qui est connu sous le nom du « syndrome de la grenouille »).

      La capacité humaine à s’adapter à son environnement m’étonnera toujours. Même les pires conditions de travail peuvent devenir « la normalité ». Pourquoi ? L’habitude.

      Nous connaissons tous bien ce mini-proverbe « on s’habitue à la misère » … Il a quelque chose de très vrai.

      Votre solution est judicieuse. Je la partage pleinement. Les rapports d’étonnements sont un très bon outil, notamment venant de « candides » (stagiaires, intérimaires, personnes de services complètement différents, fournisseurs … et consultants 😉 ).
      C’est souvent un de nos plus grands apport lorsque nous intervenons. Nous apportons un œil neuf. Et dans la plupart des cas, les responsables ou patrons sont étonnés par nos préconisations, car nous remettons en évidence « le bon sens ». Pas besoin d’investissement lourd et complexe pour améliorer la situation rapidement.

      Un dernier mot sur les intérimaires. De manière générale, ils sont perçus comme des « grouillots » sans trop de « cervelle », juste bons à faire ce qu’on leur dit de faire. Pourtant, ce sont ces mêmes personnes qui viennent de travailler plusieurs mois chez « les voisins », chez des « petits », chez des « grands », chez des « bordéliques », chez des « bien organisés » … mais aussi chez les « concurrents ». Croyez-moi, les intérimaires, ils en savent des choses. Ils ont vu et appris pas mal de techniques, d’outils et de méthodes d’organisation. Ils ont une capacité d’adaptation souvent très grande et ont participé de près ou de loin à beaucoup de projets.

      Alors pourquoi ne pas simplement leur demander … leur point de vue, leur opinion, leur avis. Vous verrez, vous serez étonné …

      Bien cordialement,

      Eric

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