De la croyance à la peur …

… il n’y a qu’un pas !

 

rondelles

 

Je voudrais commencer cet article en remerciant “Alexandre de chez FL”.

 

Merci Alex !!!

 

C’est lui qui m’a donné l’idée de cet article.

 

En effet, il m’expliquait l’autre jour qu’il avait pensé à moi lors d’une séance de bricolage dans sa maison.

L’anecdote est toute simple en soi, mais elle est très représentative du fait que nos comportements sont induits par nos schémas mentaux.

Cette anecdote, la voici …

 

 

Le bricolage d’Alexandre

 

 

Intervenant dans son entreprise, nous nous croisons au réfectoire.

Il m’interpelle et me dit :

“Tu sais que j’ai pensé à toi l’autre jour !

Devant mon étonnement, il poursuit.

J’étais en train de bricoler dans ma baraque à l’étage, lorsque j’ai eu besoin de 5 vis et des rondelles associées. Je descends au garage les chercher et je commence à en prendre 6 ou 7 …

Et soudain, je me suis souvenu de la remarque que tu m’avais faite quelques années plus tôt. Je te revoyais dans l’atelier, me demander : “si tu as besoin de 5 vis, pourquoi en prends-tu 6 ? C’est une forme de Surproduction !”

Cela m’a fait rigoler … et je n’ai pris que 5 vis et 5 rondelles …

 

 

Le constat

 

Le plus important n’est pas le fait qu’Alexandre ait pris ou non deux vis en plus. Le monde ne se serait pas arrêté de tourner …

Non, ce qui est important, c’est que son comportement est révélateur d’une habitude ancrée au plus profond de nous, et je crois même “au plus profond de nous, français”.

Cette habitude est une forme inconsciente de pessimisme globalisé qui nous pousse à intégrer “la non-qualité dans notre normalité”.

Je m’explique.

Si Alexandre prend deux vis en plus, c’est que naturellement, automatiquement, …

 

… il envisage d’en perdre une ou deux !

 

J’avoue que dans certains cas ce n’est pas idiot. Lorsque les vis sont minuscules et que, comme moi, on a de gros boudins qui nous servent de doigts … et que ceux-ci sont doublés par des gants dont la pointe n’est pas remplie (parce que les gants sont serrés mais un peu longs 🙁 ), cela peut arriver d’en perdre quelques-unes. Croyez-moi, je parle par expérience …

Mais dans la plupart des cas, il n’y a pas de raison objective.

C’est JACO, (Juste Au Cas Où).

Vous pensez bien qu’en bricolant chez soi, on ne va pas laisser comme ça, trainer une ou deux vis dans “la nature”, parce qu’on les a fait tomber malencontreusement …

 

Ce comportement relève du fait de “prévoir plus” pour amortir une certaine non-qualité. Cela est terriblement ancré dans nos schémas mentaux. Nous en avons même fait un principe …

 

Le principe de précaution

Or ce principe, personnellement, il me laisse dubitatif.

Nota : Dubitatif, ne veut pas dire que je m’y oppose. Je n’ai pas réponse à tout et dans certains cas je pense qu’il peut être grandement utile. Le problème, c’est qu’à force de précaution, on oublie parfois que vivre et avancer c’est prendre des risques. Et très souvent, ne plus prendre de risque c’est ne plus progresser, c’est stagner, et donc, perdre en compétitivité. Lire à ce sujet l’excellent article de Jean de Kervasdoué, professeur d’économie et de gestion des services de santé au CNAM.

 

 

Phénomène général

 

C’est un phénomène généralisé. Je le rencontre chaque fois que nous travaillons en groupe à concevoir une nouvelle organisation ou une nouvelle façon de travailler.

Alors même que la voie n’est pas encore tracée,

certains se focalisent déjà sur les embuches !!!

 

Et ne venez pas me dire que c’est de la prudence !!! C’est de la peur !

 

Cette peur vient principalement de nos croyances!

 

Je ne commence pas à prévoir un stock de parachutes lorsque je construis un avion.

Je ne commence pas à organiser mes vacances à l’autre bout du monde en me faisant vacciner.

Je ne commence pas un projet de nouvelle maison par le choix de l’alarme.

La prudence est nécessaire, oui,

… mais dans un second temps !!!

 

Elle servira à fiabiliser le projet, à le sécuriser.

Car si la prudence est la fondation, alors fini l’audace, fini la passion, fini l’enthousiasme et très souvent, bonjour la procrastination.

 

 

La preuve par le terrain

 

J’intervenais l’année dernière dans une belle PME du nord de la France. Nous étions en chantier de progrès. Le but était de résoudre la gestion erratique des stocks entre deux dépôts.

Le groupe a mis en avant qu’une suppression pure et simple d’un des deux dépôts dans le système d’information permettrait une simplification importante de plusieurs processus administratifs et logistiques.

Toutefois, une crainte (pour ne pas dire une peur) persistait. Celle de savoir comment réapprovisionner physiquement les stocks à partir du dépôt supprimé dans “l’informatique”. En effet, il ne serait plus possible d’éditer une liste de marchandise à prendre dans le second dépôt, puisque celui-ci n’existerait plus.

J’ai proposé de mettre en œuvre un système similaire au Kanban afin de pouvoir assure les réappro entre les emplacements physiques. L’avantage de ce petit système simple est qu’il se gère visuellement, sur le terrain, sans devoir passer par “l’informatique”.

 

Tout le monde fut rassuré, et je me suis entendu dire :

“On avait déjà pensé supprimer le dépôt, mais comme il n’y avait pas d’autre solution pour assurer les réappro physiques entre les deux dépôts, on n’a jamais osé le faire.

Maintenant, Éric, le fait d’avoir une solution alternative nous rassure et on va pouvoir enfin le supprimer ce second dépôt.”

ils-lont-fait

Et ils l’ont fait !

(c’est pour ça que j’aime bien bosser avec des PMEs !)

 

Cela a simplifié la vie de beaucoup de monde dans l’entreprise. Une estimation basse (pessimiste 😉 ) a donné un gain de 226 heures/an.

 

Oui, sauf que repris par le quotidien, et toutes les excuses qui vont avec …

 

… ils n’ont jamais mis en œuvre la solution alternative

de réappro que je leur avais proposée !!!

 

Et pourtant, l’entreprise ne s’est pas arrêtée de fonctionner,

et pourtant les stocks ne sont pas plus faux qu’avant,

et pourtant les réappro se font correctement …

 

Lors de ma dernière intervention, je me suis amusé à leur faire remarquer cet état de fait.

Ils ont alors pris conscience que …

 

… leur croyance avait généré

une peur qui les avait empêchés d’agir.

 

Et cette prise de conscience est pour moi une petite victoire, car c’est un pas de plus sur la voie du Lean.

 

 

La conclusion revient à Sénèque

 

Elle est une de mes citations préférées, une de celles que j’essaie régulièrement de m’appliquer, une de celles qui me font avancer :

 

Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas,

c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles !!!

 

seneque

 

 

 

 

 

Et vous, dans votre boite, croyances ou pas, peurs ou pas ?

 

 

 

 

 

 

2 Commentaires

  1. Jérôme DAVOIGNEAU

    Bonjour,
    Simple et tellement vrai.
    Bravo. Continuez.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

treize + 16 =