… ou l’antichambre de la procrastination !!!
Longtemps… très longtemps… trop longtemps… j’ai considéré le perfectionnisme comme une qualité.
Aujourd’hui, …
je crois le contraire !
Petit rappel trouvé sur les dicos du Web :
Perfectionnisme : Tendance à vouloir faire tout avec un souci exagéré de la perfection (Larrousse.fr)
Souci exagéré de la perfection (Reverso.net)
Procrastination : Tendance pathologique à différer, à remettre l’action au lendemain (Larrousse.fr)
Tendance à remettre au lendemain les décisions ou leur mise en œuvre (Reverso.net)
Pourquoi je vous en parle ?
Parce que j’y suis confronté tous les jours et dans toutes les entreprises dans lesquelles j’interviens.
Parce que c’est un frein constant à l’apprentissage par la pratique (le fameux Learning by doing) et ainsi, un frein à la diffusion du Lean … Lean dont nos entreprises ont tant besoin !!!
Et puis, parce que ça m’énerve … ayant tendance moi-même à être perfectionniste, je fais beaucoup d’effort pour combattre ce défaut !
Pourquoi serait-ce l’antichambre de la procrastination ?
Oh! c’est assez simple à comprendre en fait.
Lorsqu’on est perfectionniste, on souhaite que les choses soient “parfaites” avant de les présenter à autrui, avant de les démarrer… avant de les publier.
Alors on reporte sans cesse le moment où il faut se jeter à l’eau, prétextant qu’il faut fignoler un petit truc, reprendre une bricole, peaufiner un machin…
Une autre variante est d’attendre quelqu’un qui serait “autorisé à” ou plus compétent. Par exemple, “j’attends que le service Appro consulte ses fournisseurs …”, “j’attends que le service informatique me dise si c’est possible de …”, …“j’attends que les poules aient des dents »”.
Une autre fois, c’est l’excuse du professionnalisme qui est utilisée : “À faire quelque chose, autant que cela soit pro… moi, je ne suis pas un bricoleur du dimanche.” Ou bien, “Je ne vais pas bricoler un truc alors qu’on peut en acheter un propre chez …”. Ou encore, “Je ne vais pas commencer à renseigner une nouvelle table dans notre système d’information alors que l’on doit changer d’ERP l’année prochaine …”.
Quoi qu’il en soit, dans tous les cas, le résultat est le même : L’attente !
Allez, un peu de vécu de terrain, ça vous dit ?
Exemple 1 :
J’intervenais, il y a quelques années, sur un “chantier productivité” dans une papeterie.
Un problème qualité récurrent se posait lors du transport des bobines. En effet, pour déplacer la bobine (6 à 700 kg), un chariot élévateur muni d’un axe devait insérer celui-ci dans son mandrin en carton pour la soulever. La manœuvre étant assez délicate, il n’était pas rare que l’axe vienne taper dans le papier, juste à côté du mandrin et occasionne “des bugnes” (autant de feuilles rejetées plus tard).
Le groupe de progrès a alors proposé une contre-mesure sous la forme d’un flasque à insérer dans le mandrin avant la prise. Excellente idée !
La discussion a ensuite “dérapé vers le perfectionnisme”.
Il faudrait un flasque constitué d’une âme métallique et recouvert d’un caoutchouc « ni trop dur, ni trop mou » … bla-bla-bla … et il faudrait consulter tel fournisseur, en lui demandant un devis pour un proto … RE bla-bla-bla !
Inutile de vous dire combien cela m’a gonflé” !!!
Je suis passé en “mode Mac Gyver”, et avec le gars de la Maintenance qui était dans le groupe, nous avons immédiatement bricolé un flasque de fortune en contreplaqué avec un bout de tuyau de récupération (voir photo ci-dessous).
Ainsi, nous avons pu le tester le jour même … et nous rendre compte qu’il fallait faire quelques ajustements.
Mais la cerise sur le gâteau, c’est qu’après un test de deux jours en conditions réelles, nous avons pu quantifier le nombre de coups évités et par extrapolation, le coût annuel de non-qualité résultant.
Allez “chui” sympa, je vous le donne … environ 100 k€/an !!!
Exemple 2 :
Je suis intervenu, il y a quelques années, dans une fromagerie qui fabriquait 300 000 camemberts par jour. Il fallait que cela “dépote”.
Le chantier de progrès intervenait sur la fin du flux, là où le camembert est mis en boite.
Un opérateur alimentait la chaine de conditionnement en fond et en couvercle. Un contrôle automatique était fait sur chaque élément. Les couvercles défectueux étaient éjectés par soufflette pour tomber dans une poubelle.
Le souci était que bien souvent, sous la force du souffle, le couvercle tombait par terre.
Salissures, risque de sécurité (dû au sol rendu glissant) et travail pour nettoyer le tout. Beaucoup de Mudas (gaspillages)!
Le problème identifié, le groupe a proposé d’ajouter un petit carter pour guider 100 % des couvercles éjectés vers la poubelle. Jusque-là, good!
Pourtant, l’intervention suivante arrivée (un mois après !!!), rien n’avait été fait !
Je demande au groupe qui me répond “tranquillement” qu’une demande a été faite à la Maintenance pour réaliser un carter en tôle qui soit peint (histoire de faire propre et pro).
Vous commencez à me connaitre … cette passivité m’a passablement “énervé” !
Toujours en “mode Mac Gyver”, je suis allé chercher un carton propre dans une poubelle, … une paire de ciseaux, un rouleau de scotch et hop, 5 minutes après il y avait un carter improvisé.
Oui, c’est vrai, cela faisait “bricolo” ! Il n’empêche qu’ils ont constaté une amélioration immédiate de la situation !
Toutefois, ce premier carter en carton laissait encore passer quelques couvercles.
Le groupe en a alors réalisé d’autres pour améliorer le dispositif.
Et puis l’on s’est rendu compte, à l’utilisation, que cela pouvait gêner l’opérateur dans son travail quotidien. Celui-ci a participé à affiner les choses … jusqu’à que le problème soit définitivement résolu et que 100 % des couvercles soient correctement évacués.
C’est alors, seulement ensuite, que la “Maintenance” a pu construire un carter en tôle “tout beau, tout joli”.
Fort de cette expérience, le groupe a refait des tests similaires avec des carters en carton sur les autres machines…
Mais alors, quelles sont les conséquences immédiates de ce perfectionnisme ?
1) On n’apprend pas !!!
C’est certainement la pire des conséquences !!!
Vous connaissez sans doute ce proverbe « le mieux est l’ennemi du bien« . Dans nos entreprises, nous avons besoin du « Bien ». Nous n’avons pas le temps d’attendre “le Mieux”.
Le “Bien” c’est le cycle PDCA (Plan, Do, Check, Act). Le ”Mieux”, c’est rester bloqué sur le “P” du PDCA.
Quel que soit le test effectué, quelle que soit la “solution/contre-mesure” essayée, cela sera toujours plus productif … que de ne rien faire !
Pourquoi ? Tout simplement …
… parce que vous allez apprendre de vos actions !
2) On ne développe pas sa confiance en soi, son autorité, son leadership !!!
À force d’attendre que tout soit parfait, à force d’attendre après les autres, nous ne sommes pas dans l’action.
On ne tente plus, on ne risque plus. Or le leadership, la confiance en soi, l’autorité (compétence), la légitimité … cela ne vient pas sans entreprendre !
3) Cela génère un surcoût pour l’entreprise
Aussi proche de la perfection que vous croyez être, … vous en êtes encore loin !
Mais déjà, pour atteindre ce niveau, l’entreprise a investi du temps homme (le vôtre et peut-être celui de vos “collègues) et probablement fait des achats (en matériel et prestataires) pour avoir du “matos de pro”.
Or, combien de fois ai-je vu des systèmes qui avaient coûté fort cher et qui se révélaient inefficaces et inappropriés ?
Pourquoi ? Parce qu’il n’y avait pas eu de test in situ, fait avec du matériel certes “pas parfaitement adapté” ou dans des conditions “pas tout à fait optimales” … mais qui nous auraient permis de nous rendre compte sur le Gemba (et nous aurait donné des idées supplémentaires).
Ce qu’il faut retenir
Passez à l’action!
Même si tout n’est pas parfait, même si ça fait un peu “bricolo”, même si vous vous plantez… vous en retirerez toujours quelque chose qui vous servira …
…vous aurez appris !!!
[cryout-multi][cryout-column width= »1/4″]
Clin d’œil :[/cryout-column][cryout-column width= »1/2″][/cryout-column][cryout-column width= »1/4″]
[/cryout-column][/cryout-multi]